Pour une politique des associations de protection de la nature

Pour une politique des associations de protection de la nature

Ce texte a été écrit par  Jean Claude CHATAUR, président de NATURE 19, en juillet 1985.

Mon opinion émane directement de deux observations. Premièrement, par certaines de leurs action (juridiques, interventions…) les associations de protection de la nature constituent un paravent derrière lequel l’État se dispense de jouer pleinement son rôle (application automatique des lois, embauche du personnel nécessaire aux travaux scientifiques et de surveillance…) soit d’avoir une réelle et efficace politique de protection de la nature.

Deuxièmement, j’observe que les citoyens se dispensent eux aussi d’assumer leurs responsabilités en matière de protection de la nature laissant aux associations le soin de jouer ce rôle sans qu’ils aient eux-mêmes à prendre parti, voire même en se dispensant d’exercer la moindre sympathie, tout spécialement lorsqu’ils ont un bulletin de vote entre les mains.

Ainsi, la protection de la nature n’est un enjeu ni pour le peuple qui donne le pouvoir, ni pour les partis qui le reçoivent. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que la Protection de la nature ne soit pas non plus une grave préoccupation, ni pour les uns, ni pour les autres.

Or il faut, il est urgent que le plus grand nombre se sente concerné.

Les associations de protection de la nature doivent si situer par rapport à ces deux problèmes afin de n’être ni un paravent pour les uns, ni un palliatif pour les autres. Ceci revient à refuser certaines formes d’actions: actions en justice car les institutions « police et justice » existent et doivent faire leur travail. Les manifestations qui visaient à infléchir certaines décisions (uranium, pollutions, ordures, aménagements débiles…) ne doivent pas laisser croire au peuple que les associations de protection de la nature ont un quelconque pouvoir, ni même représentent l’opinion publique. C’est aux assemblées de représenter le peuple, par contre oui, l’opinion publique est à forger, et là, les associations de protection de la nature ont leur rôle à jouer, c’est-à-dire: études, informations, instruction de dossiers, projets divers, éducation …

Déjà les associations de protection de la nature ont beaucoup dit, beaucoup écrit, beaucoup affiché, beaucoup travaillé. Bientôt le peuple et les décideurs auront beaucoup d’éléments (opération ZNIEFF…). Ils seront, nous serons de plus en plus avertis, donc de plus en plus responsables. Alors il faudra que se pose la question du mode de vie, et là ce sera affaire de pouvoir, ce sera au peuple de choisir. Notre rôle est, entre autre, de clarifier ce choix, voire cette révolution du bon sens que je souhaite. Elle sera de prendre en compte les grands équilibres de la nature, les grands principes de la vie et d’en déduire nos lois et notre comportement et notre mode de vie. Et non pas d’ériger nos modes de vie en lois et nos exigences en principes, elle sera de dire « il faut » et non pas si souvent « je veux ou j’aime ça ». Elle s’appellera « non », souvent « non », surtout dans un premier temps.

Le peuple dans sa grande majorité a sans doute compris l’importance de la protection de la nature ou bien l’a-t-il sentie. Maintenant il faut que cette notion soit présente chaque fois qu’il a à choisir.
La protection de la nature doit être du domaine de la décision, et même le plus souvent possible y dominer.

Pour cela nous devrons nous situer avant la décision et pendant, et non après; il nous faut être forts d’arguments scientifiques appliqués aux événements et aux lieux. Il faut donc étudier la nature autour de nous, en équipe pour être efficace, sur le terrain, et sur les documents disponibles, quitte à la faire.

   Jean Claude CHATAUR, président de NATURE 19,
juillet 1985 (extrait de « Corrèze environnement »)

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